Le retour à la mer Usinées, tamisées, usées, rapiécées, égouttées, dégoûtées, les eaux se jettent à leau. Jacques Prévert
LA POLLUTION DES EAUX Quel constat ? Quels outils pour la caractériser ? Revue Expert - N°48, Sept 2000
-------------- 4- Comment définir la pollution des eaux ? 6- Les paramètres fondamentaux de la pollution des eaux, et les quelques outils à connaître.
-------------- Chateaurenard, Bhopal, Northville, Clear-Lake, Sandoz, Protex, Seveso, Amoco-Cadiz, Minamata, Exxon-Valdez, Tchernobyl, Erika...., ces noms nous font frémir ! La pollution des eaux représente sans aucun doutes lun des aspects les plus inquiétants, et souvent des plus spectaculaires, de la dégradation du milieu naturel qui nous entoure par notre civilisation. Aussi, il est impossible den présenter une synthèse complète en quelques pages, alors que le sujet à suscité la publication de milliers douvrages et articles scientifiques. La crise de leau, sous toutes ses formes, affecte aussi bien les pays industrialisés et les océans qui les entourent, que nos voisins du tiers monde dont les projets de développements agricoles, donc alimentaires, sont limités par le manque voire labsence de cette eau.
Notre Terre, selon la terminologie scientifique est formée de quatre grandes composantes structurelles que sont :
L'Eau : liquide incolore, inodore, transparent et insipide, lorsquil est pur (le Petit Robert) est un composé stable et neutre formé d'un atome d'oxygène et de deux atomes d'hydrogène : H2O. L'Eau est apparue avec le refroidissement de la terre par combinaison de l'oxygène et de l'hydrogène. Depuis lors, un paramètre est essentiel à retenir : la quantité d'eau sur terre est constante. L'Eau est, avec l'air que nous respirons, le plus précieux des patrimoines de l'humanité. Cette eau est lobjet de toutes les convoitises tant sur la terre que dans la recherche de son existence, ailleurs, dans lespace : dans létat actuel de nos connaissance lapparition de toute forme de vie est associée à la présence deau liquide. Or cette ressource indispensable à la vie, si elle est lobjet de tant de convoitises et despoirs, est aujourd'hui menacée par de multiples pollutions, tant lattention que nous lui portons nest pas à la hauteur de sa valeur. L'eau, représente environ 70 % du poids d'un être humain, est une composante essentielle de la structure et du métabolisme des êtres vivants. Enfin l'eau a une nature chimique extrêmement stable, et présente des propriétés physiques et chimiques tout à fait exceptionnelles qui expliquent son rôle biologique prépondérant. Un exemple de ces propriétés est l'effet hydrophobe (rejet des groupements hydrocarbonés CH) qui est en partie responsable du maintien des structures complexes de la vie (ADN, protéines, membranes, ) Toutefois, il faut noter que l'eau n'est pas d'une rareté exceptionnelle dans l'univers. On trouve de l'eau sous forme de vapeur et de glace en de nombreux points du système solaire ou de la galaxie (Miranda, satellite d'Uranus, est constitué presque exclusivement de glace et on peut y observer des falaises de glace de 20 km de haut). Par contre ce qui est rare, c'est l'existence de l'eau à l'état liquide. La terre, pour linstant, est le seul endroit connu de l'univers où l'eau existe sous cette forme. Sur terre, l'existence de l'eau sous cette forme liquide ne semble pas éternelle. Ainsi quelques scientifiques prévoient que, dans un milliard d'années, le flux solaire aura augmenté de 10 % et l'eau liquide devrait avoir alors disparu de la terre.
La quantité d'eau sur terre est de l'ordre de 1,4 milliard de km3 qui se répartissent dans cinq « réservoirs » étroitement connectés, dont l'ensemble constitue l'hydrosphère. Ces cinq grands réservoirs constituant l'hydrosphère sont : les eaux de surface (océans, rivières, ), les dépôts de glace et de neige, les eaux souterraines, l'atmosphère, et enfin la biosphère.
Le cycle de l'eau peut être défini comme étant la circulation perpétuelle de l'eau entre les cinq réservoirs cités ci-dessus. Ce cycle comprend deux compartiments distincts : - Un compartiment atmosphérique qui correspond au transport d'eau dans l'atmosphère, principalement sous forme de vapeur - Un compartiment terrestre qui concerne l'écoulement et le stockage des eaux sur la terre et dans les océans.
La durée du séjour de l'eau dans chaque réservoir est très variable et va de 9 jours environ pour l'atmosphère à plusieurs milliers d'années pour les glaciers et les océans. Le moteur de ce cycle reste l'énergie solaire qui maintient des masses d'eau en mouvement entre la terre, la mer et l'atmosphère. La vapeur deau constitue la forme à partir de laquelle seffectue le cycle. Pourtant la quantité de vapeur deau contenue dans latmosphère est dérisoire : si elle était condensée, elle occuperait une hauteur moyenne dà peine 3 cm à la surface de la terre ! Le déplacement des masses dair chargées de vapeur deau assure la distribution des précipitations, et leur refroidissement ramène leau à la surface de la terre sous forme de pluie, grêle ou neige. Il faut noter que seulement 23 % des précipitations atteignent la terre ferme, le reste se « diluant » dans les océans.
Leau, ensuite, à la surface des continents subira trois phénomènes :
- le ruissellement qui assure principalement lalimentation des cours deau.
La proportion des volumes d'eau dans les compartiments de lhydrosphère est indiquée sur le tableau suivant :
En
surface Les usages de l'eau sont multiples et concernent, par ordre d'importance des prélèvements : l'énergie, les usages domestiques, l'industrie, et l'agriculture. Il faut par exemple 300 m3 deau pour fabriquer une tonne de pâte à papier et 6 000 m3 pour produire une tonne dengrais azotés. Enfin un autre exemple, le maïs pendant sa période végétative consomme en moyenne 20 000 m3 deau à lhectare, il en faudra le double pour un hectare de riz.
La consommation deau varie par habitant dans des proportions considérables dun pays à lautre. Le record est détenu par les Etats-Unis où cette consommation est de 6300 litres par habitant et par jour, tous usages confondus, répartie également entre les emplois industriels et domestiques. En France elle est de lordre de 1700 litres par habitant et par jour. A lopposé dans les pays du tiers monde les plus démunis, cette consommation nest à peine que de lordre dune centaine de litres, usages agricoles inclus ! En 30 ans (de 1950 à 1980), la moyenne mondiale est passée de 300 à 800 m3 / habitant / an. On estime que 1,5 milliard de personnes ne disposent pas dun accès à leau potable. Les quantités d'eau prélevées en France pour chaque utilisation sont données par la Figure suivante 4- Comment définir la pollution des eaux ?
Les mécanismes et les effets de la pollution des eaux figurent paradoxalement parmi les mieux connus de toutes les nuisances, la nature des agents polluants et leur mode daction ont donné lieu à de très nombreux travaux.
On peut donner les deux définitions suivantes de la pollution des eaux.
Il y a pollution dès lors que les caractéristiques naturelles de l'eau sont modifiées. et / ou Il y a pollution si ce phénomène risque de remettre en cause les usages qui sont faits de l'eau.
De manière synthétique, nous retiendrons quatre types de pollution :
La pollution thermique Elle est causée par les rejets d'eau chaude de certaines entreprises et activités humaines (centrales thermiques notamment). Le rejet de chaleur dans lenvironnement constituant de nos jours une forme de pollution physique du milieu naturel capable de provoquer de vrais bouleversements, car dun point de vue écologique, il y a un paramètre incontournable qui est la température du milieu. Or, dans certain pays industrialisés, laugmentation de température en aval des centrales électriques peut atteindre 7 à 8°C, ce qui engendre une modification totale des communautés aquatiques et de leurs modes de fonctionnement.
La pollution biologique Elle résulte du rejet dans les eaux continentales ou littorales dune grande variété de substances organiques fermentescibles dorigines diverses (effluents urbains, matières fécales, industries, élevages,...) et se traduit par une forte contamination bactériologique. Elle soulève dans bien des cas de redoutables problèmes dhygiène publique : qualité des eaux potables, salubrité des plages,.. qui ne sont pas limités aux seuls pays du tiers monde. Cette extension incessante de la pollution microbiologique des eaux continentales et littorales à pour conséquence une recrudescence daffections pathogènes (colibacilles, hépatites, virus entériques,...). Lutilisation des cours deau comme exutoire des divers effluents : égouts urbains, industries alimentaires, abattoirs, élevages, présente donc de graves conséquences, car la dilution de ces rejets nest pas une solution acceptable.
La pollution physique et mécanique Elle est due à des matières inertes en suspension ou non. En effet le rejet de matières solides insolubles peut affecter de manière sensible les milieux aquatiques : déversements de résidus dexploitation de carrières, rejets de dragages, déchets et macro-déchets divers. Tous influent à des degrés divers sur les échanges entre les fonds et les masses deau, sur les processus dérosions, dévaporation, de colmatage,... Citons un exemple : Plus de 30 millions de touristes sagglutinent sur nos 2000 km de plages laissant derrière eux des tonnes de détritus : 11 déchets divers par jour et par personne selon une étude du Ministère de lenvironnement. De natures variée, ils sont constitués essentiellement demballages, de bouteilles plastiques, de canettes et de tubes de crème. Les déchets arrivent également par la mer au gré des tempêtes et des marées : matériel de pêche, cordages, filets, mais aussi ordures ménagères de bateaux voire de décharges sauvages plus ou moins contrôllées par nos voisins. Le problème des macro-déchets sur les côtes reste essentiellement un problème de société du à la négligence et aux habitudes prises.
La pollution chimique Elle est due aux polluants minéraux (acides, bases, sels) et aux polluants organiques (naturels ou non), largement utilisés en agriculture et dans les industries comme les nitrates, phosphates et autres sels divers. Les problèmes touchant à la pollution chimique sont innombrables, mais lune des principales causes de contamination des milieux aquatiques par nos sociétés reste les hydrocarbures et leurs dérivés. Nous citerons pour mémoire les nombreuses substances de synthèse issues du génie humain : détersifs, pesticides, Polychlorobiphényles (PCB), DDT, Phénols, dont certain ont la capacité dengendrer des sous produits (métabolites) encore plus dangereux. Citons enfin les métaux, dont les plus importants sont le plomb (on estime à 37 000 tonnes lapport annuel de plomb dans les océans), le mercure (rendu tristement célèbre par laccident de Minamata qui entraîna la mort de centaines de personnes), le cadmium, le cyanure, le cuivre, etc... Locéan mondial est systématiquement pollué, même dans ses régions les plus reculées, à titre dexemple les morues de la mer baltique présentent des teneurs record en PCB. Reconnaissons que notre civilisation technologique rejette dans les eaux de façon directe ou accidentelle dinnombrables substances organiques de synthèse. Avec ces 75 000 composés organiques et son millier de molécules annuellement crées, dont la plupart non biodégradables, la chimie peut apparaître comme le responsable principal de la contamination des eaux. Les matières plastiques constituent un contaminant largement répandu en milieu marin, découverts jusque dans locéan austral, transportés par les courants.
Rappelons pour terminer ce bref tour dhorizon que les éléments de pollution de l'eau peuvent être d'origine humaine mais aussi dorigine naturelle. En effet, lors de sa circulation dans le sol ou à la surface de la terre, l'eau se « pollue » et se charge de matières en suspension ou en solution, telles que : des particules d'argile, des déchets de végétation, des organismes vivants (plancton, bactéries, algues, ), des sels divers (nitrates, sulfates, phosphates, carbonates, ), des matières organiques (végétaux en décomposition, ), des gaz.
Ces composés présents dans les eaux naturelles peuvent être classés en deux catégories : les substances dissoutes (minérales ou organiques) et les particules en suspension. La teneur en substances dissoutes minérales varie d'une région à l'autre selon la nature du sol (granitique, calcaire, ). Les substances organiques dissoutes sont pour la plupart, 60 à 90%, d'origine naturelle. Le nombre de ces substances potentiellement présentes peut être estimé à plusieurs centaines de mille. Les particules en suspension proviennent en général du lessivage des sols et de l'activité biologique (déchets de végétation). La concentration en particules en suspension est aussi sensiblement augmentée par l'activité humaine (pollution mais aussi fragilisation de la tenue mécanique du sol).
Que ce soit pour la consommation humaine ou pour un usage industriel, il est donc rare que l'eau prélevée dans la nature soit directement utilisable car elle est souvent considérée comme polluée. Si la notion de qualité des eaux est une terminologie largement employée, cette notion de qualité est complexe à définir. La « qualité » de leau se définie généralement en fonction des usages qui en sont fait par lhomme.
Pour exemple, la notion de qualité des eaux littorales se réfère pour lessentiel à un soucis de protection de la santé humaine dans les usages qui sont faits du milieu marin : surveillance et protection de la qualité des eaux de baignade, salubrité du milieu garantissant des produits de la mer non contaminés par des germes pathogènes. En revanche la surveillance de la qualité du milieu en terme de densité de populations animales ou végétales et de diversité des peuplements nest pas assurée.
Il en est de même pour les eaux superficielles, pour lesquelles on parle dobjectifs de qualité. Il faut donc distinguer composition et qualité : La composition chimique ou bactériologique est une donnée objective résultant de mesures effectuées suivant un plan analytique adapté. Au contraire, la qualité reste le résultat dune appréciation basée sur sa capacité à satisfaire, ou non, un certain nombre dusages ayant des exigences différentes comme lalimentation des population, la baignade, la vie et la reproduction dorganismes.
La qualité des eaux est donc une notion subjective. Ainsi l'eau doit être épurée : avant utilisation pour qu'elle soit consommable ou utilisable, et après utilisation pour préserver la ressource et l'environnement. Dans tous les cas le traitement doit être adapté aux polluants présents et à leurs variations, ainsi qu'à l'usage que l'on fera de l'eau.
Pour évaluer le niveau de pollution de l'eau, il nous faut déterminer un certain nombre de paramètres, tous ne seront pas traités dans ce qui suit, et nous naborderons ainsi que les quelques paramètres considérés comme fondamentaux.
6- Les paramètres fondamentaux de la pollution des eaux, et les quelques outils à connaître. Paramètres et valeurs liées à l'oxygène. L'oxygène représente en moyenne, environ 35 % des gaz dissous dans l'eau (à pression atmosphérique normale). La teneur en gaz dissous s'exprime en mg / l. La teneur en oxygène dissous peut subir des variations importantes. Elle dépend de la température et de la salinité de l'eau, de la pression et de la température de l'air. Le déficit en oxygène est évalué par la teneur en matière oxydable. Dans les eaux de surface douces ou océaniques, l'oxygène joue un rôle fondamental dans le maintien de la vie aquatique et dans les phénomènes d'auto-épuration. Par exemple, quand la température augmente, la solubilité de l'oxygène diminue et les bactéries plus nombreuses consomment plus d'oxygène : d'où la diminution de la teneur en oxygène dissous. En France l'eau est considérée comme potable, si sa teneur en oxygène est supérieure à 4 mg/l.
La Demande Chimique en Oxygène : DCO. La DCO constitue la mesure de tout ce qui est susceptible de demander de loxygène en partie les sels minéraux oxydables, les sels de métaux et la majeure partie des composés organiques, elle permet donc dévaluer la quantité totale de pollution organique. La Demande Chimique en Oxygène, DCO, est la quantité d'oxygène (mesurée en mg) consommée dans un litre d'eau par les matières oxydables, sous l'action d'un oxydant chimique énergique. Le dosage de la DCO selon la norme française T 90-101, utilise le bichromate de potassium comme oxydant chimique, en présence d'un catalyseur (ions Ag2+). Ce dosage se fait à 140-150°C durant deux heures. Le dosage ne renseigne pas sur la nature des éléments présents et peut être faussé selon la teneur en chlore (ions Cl-). La mesure de la DCO peut être interférée notamment par la présence de chlorures et d'agents réducteurs inorganiques comme le fer (Fe II), les nitrites, les sulfures. L'interférence des chlorures peut être éliminée partiellement (cela dépend de la concentration) par l'ajout de sulfate de mercure (Hg II) à la prise d'essai. Certains composés organiques, comme les hydrocarbures aromatiques, ne sont pas oxydés complètement. Dans ce cas la DCO n'est pas représentative de la matière organique présente dans l'échantillon. Les COV (Composés Organiques Volatils) sont également partiellement ou pas du tout dosés.
La Demande Biologique en Oxygène : DBO. La DBO constitue une mesure de la pollution des eaux par les matières organiques et permet dévaluer la part biodégradable de la pollution organique. En effet le rejet de matières fermentescibles par un égout, par exemple, provoque une diminution de la teneur en oxygène dissous par dégradation sous laction de bactéries aérobies. La Demande Biologique en Oxygène, DBO, est la quantité d'oxygène (mesurée en mg / l) nécessaire à l'oxydation par voie biologique, sous l'action des micro-organismes, des matières organiques présentes dans l'eau.
La mesure de la DBO en 5 jours, ou DBO5, selon la norme française T 90-103, correspond à la consommation d'oxygène d'une masse d'eau conservée à l'obscurité en tube fermé à 20°C pendant 5 jours. Cette consommation est proportionnelle à la quantité de matière organique biologiquement oxydable contenue dans l'eau, et donc à son niveau de pollution. La DBO5 est une partie de la DCO : 0 < DBO5 / DCO < 1
En France la valeur moyenne de la DBO dans les rejets bruts est de 60 à 70 g / j / habitant. Comme la valeur en oxygène dissous est généralement de l'ordre de quelques mg par litre, une telle valeur provoquerait une désoxygénation considérable du milieu si les effluents étaient rejetés directement sans traitements.
La Demande Totale en Oxygène : DTO. La Demande Totale en Oxygène, DTO, est la quantité d'oxygène (exprimée en mg / l) nécessaire à la combustion totale en atmosphère oxydante d'un litre d'échantillon soumis à analyse. Dans la majorité des cas, la Demande Totale en Oxygène et la Demande Chimique en Oxygène sont très voisines (sauf si l'échantillon contient des ions tels que Cl-, SO42-, NO3-, NH4+). En France, la matière oxydable définie ci-dessus n'est pas celle utilisée par les agences de l'eau (pour le calcul de la redevance pollution). En effet, il est pris en compte l'ensemble des matières contenues dans l'effluent polluant, dotées d'un pouvoir réducteur.
Le calcul est donc le suivant : Matières OXydables = MOX (O2 mg / l) = ( DCO + 2 DBO5 ) / 3
Le Carbone. Les définitions suivantes peuvent être données (T 90-102) : Le Carbone Total, CT, est la totalité du carbone présent dans les matières dissoutes et en suspension dans l'eau. Le Carbone Inorganique Total, CIT, est la totalité du carbone présent dans les matières inorganiques dissoutes et en suspension dans l'eau. Le Carbone Organique Total, COT, est la totalité du carbone présent dans les matières organiques dissoutes et en suspension dans l'eau.
Toutes les méthodes de dosage du CT dans l'eau reposent sur le principe de l'oxydation du carbone en dioxyde de carbone. Cette oxydation est réalisée par combustion, réaction chimique ou autre.
Echanges avec les milieux ambiants. Les modifications de la qualité des eaux peuvent être appréciées par la détermination des paramètres suivants : les matières en suspension, la turbidité, la neutralité, la température, la salinité.
Les solides dispersés dans les rejets ont pour effet de diminuer la transparence de l'eau et, par conséquent, la propagation de l'énergie solaire nécessaire aux organismes autotrophes, base de toute chaîne alimentaire. En se déposant sur les fonds, dans les zones calmes, ils modifient les habitats du benthos et peuvent emprisonner des micro-polluants. Ils peuvent aussi provoquer l'asphyxie des poissons par colmatage des ouïes.
Les Matières En Suspension, MES. Elles correspondent à la masse de matière (mg/l ou g/l) recueillie par filtration ou centrifugation et séchage en étuve à 105°C. Que ce soit pour un usage domestique ou industriel, l'élimination des MES par décantation naturelle ou assistée, est souvent la première opération nécessaire (et réalisée). Au delà de 25 mg/l, il y a risque de colmatage des branchies des poissons. La détermination des MES se fait selon la norme T90-105.
Les Matières En Suspension Organiques, MESO. Les MESO, représentent la fraction de la matière en suspension totale restante lorsque l'on a enlevé les matières minérales fines en suspension.
Les Matières Décantables, MD. Les MD correspondent à la quantité de matière qui s'est déposée gravitairement après avoir laissé l'échantillon au repos pendant 2 heures. Les MD s'expriment en pourcentage volumique par rapport au volume total de l'échantillon, ou en mg / l.
La Turbidité. Elle caractérise la non-transparence de l'eau. La turbidité, après décantation pendant 2 heures, turbidité ad2, permet d'apprécier la teneur en matières colloïdales, non décantables.
La Neutralité, pH. Le pH constitue une mesure de la concentration en ions H+. La valeur du pH conditionne les équilibres physico-chimiques et peut les déplacer vers des éléments plus ou moins toxiques. La vie des poissons est impossible si le pH est inférieur à 6 (acide) et supérieur à 9 (alcalin). à pH < 6, l'équilibre bicarbonate / gaz carbonique est déplacé vers le gaz carbonique dont la concentration augmente et devient toxique sur la faune piscicole à partir de 100 mg/l. à pH > 8, il y a libération d'ammoniac moléculaire (plus toxique que l'ammoniac ionique), dont le seuil de mortalité pour les poissons est compris entre 0,2 et 2 mg/l.
La Température, T°. C'est un facteur important de la vie aquatique. L'élévation de température, due à des activités humaines, affecte les propriétés physico-chimiques de l'eau et peut avoir de graves conséquences sur le métabolisme des organismes vivants. Les propriétés physico-chimiques de l'eau affectées par la variation de température sont : la densité et la viscosité, la tension de vapeur (donc l'évaporation), la solubilité des gaz, les vitesses des réactions chimiques et biologiques.
La Salinité. La salinité correspond à la teneur en sels dissous d'une eau. De cette teneur dépend la résistance que l'eau oppose au passage d'un courant électrique. Cette résistance peut s'exprimer en terme de résistivité ou de conductivité. La résistivité, R, est la résistance d'une colonne d'eau comprise entre deux électrodes métalliques parallèles de 1 cm2 de surface chacune, et distantes de 1 cm. Elle s'exprime en ohm-centimètres : W.cm La conductivité est l'inverse de la résistivité et elle s'exprime en siemens par centimètre : S / cm, ou plus couramment dans les eaux naturelles en micro-siemens par cm mS / cm. C = 1 / R Une conductivité élevée traduit soit des pH anormaux, soit le plus souvent une salinité élevée.
Le Film de surface. Le film de surface qui correspond à l'interface entre l'eau et l'atmosphère joue un rôle très important au niveau des échanges gazeux entre ces deux milieux. Les caractéristiques de ce film peuvent être modifiées par les retombées atmosphériques ou le déversement de certains polluants comme les détergents ou les hydrocarbures.
La Notion de Toxicité Si le terme "toxique" évoque des cas de pollution graves et spectaculaires, ce sont surtout les effets toxiques à moyen et à long terme qui présentent le plus de dangers pour l'homme et son environnement.
Un produit toxique peut toucher les organismes aquatiques de deux manières : Soit par contamination directe (absorption ou adsorption), soit par la contamination indirecte, du fait de la consommation d'espèces contaminées. Dans ce cas, on peut avoir un phénomène de Bio-accumulation le long de la chaîne alimentaire, ce qui représente un risque réel pour l'homme qui se situe toujours en fin de chaine.
Si on se réfère à une échelle de temps et d'effets, on peu distinguer plusieurs toxicités :
* la toxicité aiguë, dont les effets à court terme apparaissent à la suite d'une exposition de durée brève. Dans le cas des milieux aquatiques se sont toujours des mortalités massives, donc spectaculaires, de poissons qui sont le plus médiatisées.
* la toxicité à moyen et à long terme qui apparaît pour des expositions de longue durée à des expositions faibles. Les effets sont variables : altération du développement, de la reproduction, du comportement,
La toxicité aquatique s'exprime par la CL 50 / 24h, (concentration qui provoque la mortalité de la moitié des individus testés au bout de 24h) Les toxicités aiguës sont évaluées par les teneurs en matières inhibitrices et en micro-polluants. Les matières inhibitrices, sont évaluées à l'aide du tests "daphnies" selon la norme T 90-301, qui consiste à déterminer la dilution qu'il faut appliquer à un échantillon d'eau pour immobiliser, ou inhiber, après 24 h, 50% des daphnies (daphnia magma) mises en contact avec le produit. L'unité de mesure est l'équitox : EQUITOX = 1 / (CL 50 / 24h). Un échantillon toxique aura un équitox égal ou voisin de 1.
Les micro-polluants, sont des toxiques que l'on retrouve généralement en concentration faible. Le danger vient surtout de leur capacité à s'accumuler dans les chaînes alimentaires. Ils peuvent être dosés spécifiquement, ou appréciés globalement. Il existe trois principales familles de micro-polluants : les métaux lourds (mercure, plomb, cadmium, chrome, cuivre, ), les composés organiques de synthèse, les produits radioactifs La toxicité à long terme des métaux a pour unité de mesure le METOX, elle est donnée dans une échelle de 1 à 50 suivant quatre classes de toxicité :
- 1g de zinc ou de chrome = 1 métox - 1g de cuivre ou de nickel = 5 métox - 1g de plomb ou d'arsenic = 10 métox - 1g de mercure ou de cadmium = 50 métox.
La notion d'équivalent habitant : E H . L'Equivalent Habitant, EH, correspond aux rejets moyens journaliers de chaque habitant dans les eaux. La valeur de l'EH est fixé par décret (arr. du 10/12/91)
La quantité journalière de pollution à prendre en compte pour chaque habitant est denviron : 90g de MES, 57g de MOX, 0,2 EQUITOX, 1,5g d'azote réduit, 4g de phosphore total, 0,05g de composés organohalogénés, et 0,23 METOX.
Ainsi une usine qui rejette 8 tonnes par jour de matières oxydables pollue d'une façon analogue à une ville de 140 000 habitants. Pour tenir compte à la fois des MES et des MOX on utilise la formule : EH = (MOX + (MES / 3)) / 0,087 = (DCO + 2 DBO5 + MES) / 0,26 La Notion de Biodégradabilité
La biodégradabilité est la propriété des composés chimiques susceptibles de subir une dégradation sous laction généralement liée aux micro-organismes décomposeurs présents dans le milieu. Cette dégradation permet, en règle générale, la neutralisation des agents polluants dans les milieux aquatiques. Il convient cependant de noter quen certain cas la biodégradation peut conduire, au moins dans une première phase, à la formation de composés intermédiaires dune toxicité supérieure au polluant initial : ainsi laldrine, un insecticide, peut se transformer en dieldrine (autre insecticide) qui est plus toxique. Pour recaller cette notion de biodégradabilté dans le temps, nous donnerons les exemples suivants de dégradation de quelques macro-déchets en milieu aquatique : Tichet dautobus : 2 à 4 semaines, Mouchoir en papier : 2 mois, Mégot de cigarette : 6 mois, Huile de vidange : 5 à 10 ans, Canette en aluminium : 100 ans, Sac ou bouteille plastique : 100 à 500 ans.
Comme nous venons de le décrire très sommairement, les paramètres de la pollution des eaux sont, pour la plupart, connus (contrairement à lensemble des effets qui restent pour certain complexes à quantifier). Les outils de mesures et dappréciation de niveaux de pollutions sont à la disposition des experts pour appréhender et caractériser au mieux les phénomènes, et les méthodes analytiques disponibles font lobjet dune normalisation stricte tant nationale quinternationale. Mais depuis la fin du XVIIIème siècle, les parisiens ne boivent plus leau de la Seine, les grands fleuves et certaine nappes phréatiques sont dans un état alarmant au point dêtre impropres aux usages domestiques, voire parfois même industriels et agricoles, et les océans sont lobjet de part le monde de problèmes de contaminations irréversibles. Les gestionnaires de ces différents milieux font le constat de pollutions chroniques et permanentes, et dans certaines zones de notre pays les objectifs de qualités affichés resteront sans réel effet.
Leau potable, en particulier, devient un enjeu majeur qui met chacun des acteurs : utilisateurs, gestionnaires, élus et pollueurs, devant ses responsabilités, mais, dans ce cas particulier, nombreux sont les contentieux réglés en justice pour dépassement de normes : La dégradation de la qualité de leau potable ne restera plus impunie car les consommateurs ont désormais gain de cause en assignant devant les tribunaux les sociétés de distribution des eaux. Toutefois, la tâche pour lexpert se complique car ces affaires particulières reposent inévitablement le problème des seuils fixés par les directives européennes et les valeurs guides de lOrganisation Mondiale de Santé (O.M.S.), normes qui reposent souvent sur des recherches médicales et toxicologiques, mais qui parfois relèvent dun flou volontairement entretenu par laction de lobbies industriels. En tout état de cause les normes semblent le plus souvent être un compromis entre la protection de la santé, celle de lenvironnement, teintés dun soupçon de considérations politiques.
Produits chimiques, effluents toxiques, déchets industriels : à long terme, la pollution chronique influe sur les écosystèmes aquatiques beaucoup plus gravement que les pollutions accidentelles. Néanmoins, si ses effets néfastes sont, à court terme, aisément décelables, on ignore encore la réaction à long terme des écosystèmes aquatiques face à des perturbations répétées dintensités variables. Il semble donc essentiel que tant dun point de vue qualitatif que quantitatif la préservation des milieux aquatiques, dans toute leur diversité, soit lune de nos préoccupations majeures. La sauvegarde de ces ressources dépend de deux actions : la préservation de la ressource elle même, et la réduction des pollutions affectant cette ressource.
Une simple anecdote pour conclure : jai participé, en mars 2000, à une mission dexpertise en République CentrAfricaine en vue détablir la faisabilité dune programme de développement piscicole. Après 250 km de piste et quelques heures de marche en pleine brousse tropicale, nous sommes arrivés sur les bord dune rivière magnifique : la Mbi. Au pied dune chute jai effectué un prélèvement deau qui fut analysé par lInstitut Pasteur de Bangui. Dun point de vue bactériologique, cette eau, selon nos critères européens, était impropre à la consommation. Cela était du simplement du à lentraînement par les eaux des quelques déjections animales présentes en amont. |
Michel
VINCENT Expert - Consultant
Retour Accueil Tel : + 33 (0) 4 94 59 35 59 - Fax : + 33 (0) 4 94 86 54 88 - E.mail : mvaquaex@infonie.fr ou aquaculture.expert@free.fr
|